Emmanuel Macron et la lutte contre les fausses informations

"Fake news : derrière l'effet d'annonce, Emmanuel Macron esquive le vrai débat. Saisissons-en nous !" Voila le titre d'un billet publié le 4 janvier 2018 par La Quadrature Du Net sur son site web.

L'article parle de "fake news". C'est une expression à la mode pour "fausses informations", parce que l'anglais serait plus "cool" et que ça permet de faire "moderne". De plus, "fake news" complique la compréhension aux gens qui ne comprennent pas l'anglais, en utilisant inutilement l'anglais (qui dans ce cas n'apporte aucun sens légèrement différent comme c'est parfois le cas). Selon moi, cela dénote un penchant (sans doute involontaire de la part de La Quadrature Du Net) pour utiliser un vocabulaire de classe, le vocabulaire de la "classe éduquée".

L'article de LQDN (La Quadrature Du Net) met en évidence (à raison selon moi) le rôle d'un modèle économique basé sur l'exploitation des données personnelles permettant la publicité lucrative ciblée et facilitant la captation du temps de cerveau disponible (en montrant des informations qui sont faites pour donner envie de rester sur les plateformes capteuses de données personnelles). Néanmoins, il n'évoque pas le manque d'esprit critique (qui est la source de la croyance en de fausses informations) qui pourrait être plus enseigné (par exemple par l'Éducation Nationale) et ce qui donne envie d'adhérer à des informations contre l'idéologie dominante (qui sont parfois fausses mais c'est loin d'être toujours le cas). Je ne pense pas que l'article de LQDN soit à jeter, mais je le trouve problématique par les aspects que j'ai énoncé.

Si vous voulez en savoir plus sur ce qui (selon moi) pousse à adhérer à des informations contre l'idéologie dominante (dont certaines sont fausses), Frédéric Lordon a fait un très bon article : "Politique post-vérité ou journalisme post-politique ?" (publié le 22 novembre 2016 sur son blog "La pompe à phynance" hébergé sur le site web du journal "Le Monde diplomatique"). C'est long, mais c'est nécessaire pour exprimer un ensemble d'idées qui n'est pas trivial ou du moins pas largement rabâché dans l'idéologie dominante (et nécessitant en conséquence de prendre le temps d'aller contre de potentiels aprioris qui pourraient être installées bien profondément dans certaines têtes). Il y a quelques extraits ci-dessous, ils sont faits pour donner envie de lire l'article en entier, donc je les ai mis précisément pour ne pas s'en contenter (même si bien entendu le risque existe).

Au fait, pourquoi en sont-elles [les populations] venues ainsi à écumer de colère, sous l'effet de quelles causes, par exemple de quelles transformations économiques, comment en sont-elles arrivées au point même de se rendre aux pires mensonges ?
les réseaux sociaux, nous explique Viner, sont par excellence le lieu de la post-vérité car ils enferment leurs adhérents dans des « bulles de filtre », ces algorithmes qui ne leur donnent que ce qu'ils ont envie de manger et ne laissent jamais venir à eux quelque idée contrariante, organisant ainsi la végétation dans le même, l'auto-renforcement de la pensée hors de toute perturbation. Mais on croirait lire là une description de la presse mainstream, qui ne se rend visiblement pas compte qu'elle n'a jamais été elle-même autre chose qu'une gigantesque bulle de filtre !
le peuple obtus continue, lui, de penser qu'il y a encore matière à discuter, et quand toutes les institutions établies de la post-politique refusent de faire droit à cet élémentaire désir de politique, alors ce peuple est prêt à saisir n'importe quelle proposition, fût-ce la pire, pourvu qu'elle soit celle d'une différence