Faire le pont entre la transition permaculturelle de Rob Hopkins et la grève féministe du 8 mars
La domination masculine est une réalité et ce n'est nullement l'état naturel des choses, en fait c'est l'exact opposé : une construction sociale (1). De cette injustice là, nombre de personnes en ont pris conscience (certes à des degrés variés), et parmi celles-ci certaines on voulut sa fin (2). C'est ainsi qu'est né le féminisme, qui n'a point pour projet de remplacer le patriarcat par le matriarcat, mais que le premier disparaisse et le second n'advienne pas, c'est donc un autre nom pour l'anti-sexisme, mais féminisme désigne le sexe (ou plutôt le genre) qui est socialement dominant (du moins à l'époque de l'écriture de ce texte).
Le sexisme est si profondément ancré depuis si longtemps qu'il est parfois inapercu et qu'on peut estimer qu'il est à peu près partout. Il ne faut donc pas s'étonner qu'il se retrouve dans le travail et dans la rémunération. Le plus évident est le travail domestique : il n'est pour une bonne part pas rémunéré et est fait essentiellement par les femmes (3). De plus, ces femmes peuvent avoir le malheur d'être liées à leurs maris pour leur subsitance matérielle, et ainsi devoir lui obéir, certes dans une certaine mesure mais en fait pour l'essentiel, ou s'en séparer au risque létal du dépérissement matériel. En modernisateur, le capitalisme a fait accéder une part croissante de femmes au salariat, permettant ainsi de s'émanciper du mari, au profit du marché du travail, qui n'est pas exempt de problème mais est toutefois plus souple. Cependant les femmes sont en moyenne moins payées que les hommes, quand les activités sont réputés productrices de valeur économique (4), y compris à travail équivalent (5) ! À juste titre, cela ne plait pas, à de nombreuses femmes en premier lieu, mais aussi à des hommes en faveur de l'émancipation fémmine réelle (c'est-à-dire à l'émancipation sociale des femmes), qui ne consiste évidemment pas à acheter un lave-linges (que des idiots de marketeux auraient pu mettre en promotion en leur "honneur"). Pour protester une des actions a été la grève (qui consiste en l'arrêt du travail habituel), comme celle du 8 mars (6).
Le mouvement de la transition permaculturelle, dont Rob Hopkins a proposé un manuel (7), est contre le sexisme sans que ce soit un sujet qui lui soit central et la grève n'est pas de ses méthodes "primitives". Pourtant la réflexion féministe lui manque et la grève ainsi que ce qui lui est lié n'est pas ou peu pensé (alors que c'est tout de même là un moyen historique de combattre le capitalisme que l'on peut penser anti-écologique). En miroir, les personnes pratiquant le militantisme sociale ont généralement un intérêt pour le féminisme. De plus, elles ont parfois aussi la volonté de construire une société post-capitaliste (qui ne soit pas pour autant un retour à la féodalité) ou au moins d'atténuer certains effets du capitalisme. Du point de vue de la permaculture, on peut regretter qu'elles ont souvent une vision superficielle de l'écologie, aussi bien des problèmes que des potentielles solutions pour y remédier et de la temporalité (8).
En s'intéressant à la permaculture (9), qui a la prétention de proposer une grille de lecture holistique des phénomènes naturels non-humains et qui s'accompagne d'une pratique ayant fait ses preuves en particulier en agriculture réellement biologique, les tendances historiques pour l'émancipation sociale (féminisme, anarchisme, communisme, socialisme, etc.) pourraient considérablement renforcer leurs programmes d'écologie politique (10), et donc la viabilité matérielle du type de société et de mode(s) de vie qui seraient considérés comme souhaitables. De plus, étant donné que les problèmes écologiques s'accumulent (limite des ressources, changement climatique, pollution, nucléaire, destruction des sols, etc.) et qu'ils ont tendance à s'aggraver, il se pourrait bien que cela cause de graves dégâts, qui pourrait bien provoquer une moindre adhésion à l'organisation dominante et son idéologie (11), et donc on peut facilement imaginer que ceux-ci puissent être indirectement des leviers en vue d'une révolution ou au moins de réformes significatives. On peut d'ailleurs faire remarquer que la permaculture ne se prive pas d'évoquer ce thème, mais vraiment pas beaucoup et sans réflexion extensive, et qu'on peut la considérer comme un système idéologique ainsi que la mise en pratique d'un nouveau mode de production.
Le liant potentiellement le plus propice est le municipalisme libertaire (12), que l'on peut aussi nommé anarcho-municipalisme ou anarcho-communimalisme. En effet, il y est question de transition sociale et écologique via la cité et par la base. Pour les personnes inspirées par la théorie sociale, elles trouveront dans la permaculture une réflexion écologie détaillée. Pour ce qui est de la permaculture, et en particulier le mouvement des villes en transition, il y a là un précieux complément social et une proposition d'organisation à grande échelle (qui va largement au-delà des écovillages) via le fédéralisme ou le confédéralisme (qui est une proposition classique de l'anarchisme institutionnel). La vision très technologiste de Murray Bookchin (13) pourrait ne pas convenir aux personnes permacultrices, mais cela ne fait heureusement nullement partie de l'essence du municipalisme libertaire et ce n'est d'ailleurs pas du tout le centre de sa réflexion.
Pour ce qui est du féminisme, il a déjà été explicitement lié à l'écologie : il s'agit tout simplement de l'éco-féminisme. Ce courant de pensée peut être une porte d'entrée de premier choix dans le féminisme pour les personnes se revendiquant de la permaculture. On peut d'ailleurs noté qu'il est fait explicitement mention de l'éco-féminisme dans le livre "Une autre fin du monde est possible" (14), dont un des co-auteurs est Pablo Servigne, qui est très clairement pro-permaculture (15).
D'ailleurs, Pablo Servigne peut être considéré comme un auteur de prédilection pour relier social et écologie. En effet, il a réfléchi et expliqué simplement de grandes menaces écologiques (16) et il s'intéresse à la question sociale. David Holmgren (un des 2 co-fondateurs de la permaculture) a reconnu avoir été influencé par l'ouvrage "L'entraide, un facteur de l'évolution" de Pierre Kropotkine (1842-1921), or c'est une figure historique de l'anarcho-communisme et Pablo Servigne l'apprécie beaucoup. Ce dernier (avec une autre personne) a été jusqu'à proposer une sorte de suite sur l'entraide : "L'entraide, l'autre loi de la jungle" (17), de quoi intéresser particulièrement les anarchistes et renforcer le lien avec la permaculture. Si on voulait aller plus loin, on pourrait proposer le concept de permanarchisme (18) et s'aventurer à lui donner un contenu théorique et pratique. À celles et ceux qui trouveraient bizarre ou contre-nature d'entrelasser permaculture et anarchisme, on pourra faire remarquer que cette éventualité est présente dans le "Manuel de Transition" (7) en français à la fin du chapitre 12.
En permaculture agricole, et en fait plus généralement en agriculture, il faut s'occuper de son site sans pause longue (en terme de jours) et il y a production de nourriture qui est essentielle à la survie humaine. Il est donc assez compréhensible que la notion de grève ne soit pas un élément important de la théorie permaculturelle "primitive" (ou plus précisément théorie permaculturelle laissée théoriquement à elle-même pour ce qui est du social, c'est-à-dire sans lien théorique ou plutôt avec des liens mais bien peu nombreux et/ou minces). Néanmoins la grève et le sabotage ont une précieuse vertue écologique (au moins de court-terme) : ils nuisent à l'économie (19), dont la croissance en régime capitaliste a au moins jusqu'à maintenant nui à la préservation de la bio-sphère (20).
On peut en profiter pour faire un pont avec la décroissance (21), qui est déjà une liaison de l'écologie et du social, et c'est d'ailleurs le sujet du chapitre 13 du "Manuel de Transition" (7) (dans sa version française chez écosociété). De nombreuses personnes de cette tendance pensent le capitalisme ou au moins la société de consommation (qui n'est qu'une étape du capitalisme et nullement son commencement, puisqu'on l'a fait usuellement débuté en 1950, tandis que c'est souvent plutôt 1750 pour le capitalisme, en l'occurrence en Angleterre, après ce que Karl Marx a nommé "l'accumulation primitive"). Cela peut être jugé intéressant pour compléter la permaculture sur cet aspect. De plus, on trouve dans la décroissance une réflexion écologique qui est à la fois social et à l'échelle de la société (donc au-delà de l'éco-village). On y trouve notamment le penseur Ivan Illich (22), qui a entre autres proposé un autre modèle d'organisation sociale, qu'il a nommé société conviviale (23). Parmi les idées de la décroissance, il est parfois fait mention de la volonté de créer et vivre dans une démocratie économique, en mentionnant en France parfois, plus ou moins explicitement, la méta-proposition de Bernard Friot (24) : le salaire à vie (25).
La volonté d'une démocratie économique et la pratique de la grève des personnes travaillant se retrouve dans une tendance historique : le syndicalisme révolutionnaire (26). Ce n'est pas un synonyme d'anarcho-syndicalisme. En effet, le premier concerne un but, en l'occurrence une révolution par les travailleurs et travailleurs. Pour ce qui est du second, c'est un mode d'organisation, en l'occurrence l'anarchisme institutionnel et donc la pratique de l'auto-gestion (27) dans la société (et pas isolé dans son coin), ce qui fait une volonté commune avec la transition permaculturelle de faire le changement essentiellement par la base. Néanmoins il y a historiquement un fort mélange entre les deux (28).
Alors que la pensée permaculturelle indique que la société actuelle va disparaitre involontairement, le syndicalisme révolutionnaire veut lui la vaincre par la grève générale expropriatrice pour en créer une autre. Il y a donc la notion d'effondrement dans ces 2 courants de pensé. En revanche, la réflexion dans le syndicalisme tente d'analyser l'organisation actuelle de la société, ce qui pourrait s'avérer utile pour ne pas en reproduire des problèmes, et l'effondrement humain est déjà à percevoir ici et maintenant. C'est qu'en effet la perte du salaire et/ou les potentielles pressions dans le cadre du travail rémunéré peuvent très bien terrasser (au moins momentanément) un individu ou un groupe d'individus (29). Cela donne de quoi nourrir une réflexion sur l'effondrement individuel et collectif et a de quoi tempérer le "je-m-en-foutisme" de l'époque qui est présent chez certaines personnes permacultrices sous le prétexte de la certitude de l'effondrement prochain de la société contemporaine.
Mais il y a aussi dans le féminisme
que l'effondrement est présent.
D'une manière traditionnelle,
il y a les violences sexistes qui peuvent y conduire.
Un exemple classique est le viol,
qui peut être doublé de l'extrême violence de personnes crétines
qui font valoir qu'au moins un vêtement ou comportement
fait que ça [l'agression] a été bien cherché
,
incitant ainsi à l'auto-censure et
à ne pas blamer la personne agresseuse,
quand cela ne verse pas dans l'odieux délirant
qui transforme la personne agresseuse
en la pauvre victime d'au moins une pulsion
provoquée par la personne vraiment agréssée
et jusqu'à parfois s'apitoyer que
la personne vraiment agresseuse soit accusée.
Comme le syndicalisme,
le féminisme pense le problème et comment le résoudre,
tout en visant à transformer politiquement la société,
ce que l'on peut juger comme un manque de la permaculture
ou au moins comme une réflexion sous-développée en son sein,
alors que l'effondrement d'une société
n'engendre pas magiquement l'avènement
d'une nouvelle société qui serait harmonieuse.
La force collective du syndicalisme, en fait plus génériquement la force institutionnelle (30), peut entrainer un vaste mouvement. Par exemple, le 8 mars 2018 en Espagne, de petits syndicats salariales (dont la Confederación Nacional del Trabajo, la Confederación General del Trabajo, et Intersindical) ont proposé de faire grève la journée entière (et pas juste à partir de l'heure où les femmes arrêtent d'être payées en moyenne ou médiane en comparaison des hommes qui peut par exemple être estimé à 15h40), ce qui a été suivie par des millions de personnes dans le pays, alors que les syndicats ayant contribué à l'insuffler étaient au moins à cette époque ridiculement petits en comparaison du mouvement. Cette puissance potentielle d'organisation "forte" (différente d'un simple réseau autour d'une idée) est absente en permaculture, y compris dans le mouvement de la transition permaculturelle, alors que ça peut être fortement utile. Par là, on peut en revenir à l'intérêt que les personnes permacultrices, ou plus généralement celles s'y intéressant, pourraient porter au municipalisme libertaire (12), en particulier les gens participant à la transition écologique et social selon Rob Hopkins. Mais le sujet de l'organisation de la production, qu'elle soit actuelle et/ou future, voire le projet d'un syndicat anarcho-communiste comme institution dominante de la société à la place de forme actuelle de l'État, ou comme moyen de transitionner progressivement du monde actuel (très industrialisé et avec une forte division du travail) à un municipalisme libertaire permaculturelle, pourraient aussi intéresser certaines personnes. Le syndicalisme de travail permet aussi de s'organiser collectivement sur le plan professionnel, ce qui peut s'avérer être utile, pour entre autres s'entraider et faire valoir ses droits. Les personnes syndicalistes révolutionnaires ont elleux de quoi s'intéresser à la permaculture, pour la viabilité de la révolution dans un système de production fortement dépendant d'importations de pays tiers (qui pourrait les stopper pour la briser) et construire une autre société écologiquement viable. Pour ce qui est de la transition selon Rob Hopkins, il y a là un vivier de gens ayant la prétention de vouloir changer les choses par la base d'une manière démocratiquement organisée, ce qui devrait en particulier plaire aux anarcho-syndicalistes et anarcho-communalistes.
Faire des ponts théoriques
entre différents courants de pensée,
voila au mieux ce que ce texte fait.
On peut trouver que c'est joli, peut-être même excitant.
Mais à ce stade, ça reste de la théorie, et juste ça.
Les idées peuvent des guides à l'action,
mais elles n'en engendrent pas nécessairement.
Voila de quoi ressortir cette veille phrase
qui n'a nullement veilli :
Les philosophes n'ont fait qu'interpréter
le monde de diverses manières,
il s'agit maintenant de le transformer.
(31)
Notes
-
La domination masculine peut être désigné
avec le mot "patriarcat".
Parmi les personnes contre la domination masculine,
on peut entre autres citer :
Marie Gouze / Olympe de Gouges (1748-1793),
Pauline Léon (1768-1838),
Louise Michel (1830-1905),
Voltairine de Cleyre (1866-1912),
Emma Goldman (1869-1940),
Simone de Beauvoir (1908-1986),
Judith Butler.
La blogueue féministe Buffy Mars
a proposé les ouvrages suivants pour découvrir le féminisme
(dans "Féminisme : 4 lectures pour celleux qui découvrent"
publié le 6 novembre 2018
sur son site web
www.toutestpolitique.fr
) : "Nous sommes tous des féministes" (Chimamanda Ngozi Adichie, 2015, Folio), "Le féminisme" (Anne-Charlotte Husson et Thomas Mathieu, 2016, La petite Bédéthèque des Savoirs chez Le Lombard), "King Kong théorie" (Virginie Despentes, Grasset en 2006 et Librairie générale française en 2007), "Les gros mots : abécédaire joyeusement moderne du féminisme" (Clarence Edgar-Rosa, 2016, Hugo Doc). - Sur le travail domestique et son inégale répartition, l'INSEE (Institut National de la Statistique et des Études Économiques) a par exemple pondu un document nommé "Le travail domestique : 60 milliards d'heures en 2010". Il y est estimé que l'on pourrait considérer que la valeur économique du travail domestique dans la France de 2010 ait une valeur équivalente à 33% du PIB (Produit Intérieur Brut) de l'époque (dont l'ordre de grandeur est 2000 milliards d'euros). La part de femmes dans le travail domestique est évaluée à 64%.
- Pour une critique socio-philosphique radicale de la valeur, on peut proposer de lire le livre "La Condition anarchique - Affects et institutions de la valeur" (écrit par Frédéric Lordon et publié en 2018 aux éditions Seuil, puis adapté au format poche en 2020 aux éditions Points). Si on cherche à s'intéresser à la valeur sous un angle économique plus spécifiquement économique, on peut se tourner par exemple vers Bernard Friot (18). Pour une lecture plus courte qu'un livre et incorporant la question féministe, on peut proposer de lire "La grève des stages est une grève des femmes" publié par le syndicat SUD Étudiant-e-s et Précaires (et mis en ligne le 30 octobre 2018 sur sud-ep.ch).
- Sur les inégalités économiques sexistes, "Inégalités salariales entre hommes et femmes : les métiers exercés et le temps de travail expliquent plus de la moitié des écarts" (fait par l'INSEE et paru le 15 septembre 2016) estime qu'à profession équivalente les femmes auraient un salaire horaire de 10% inférieur à celui d'un homme. Il est question de la Bourgogne-Franche-Comté, mais il faudra être sacrément motivé pour tenter de convaincre que cet écart significatif s'expliquerait par un sexisme particulièrement fort dans cette région.
- Le 8 mars est considéré comme la journée internationale des femmes. Elle est également appelée journée internationale des droits des femmes. Cette date est reconnue par l'ONU (Organisation des Nations Unies). C'est une journée usuelle de lutte pour l'égalité homme-femme. Une des formes courantes de la pratiquer est de faire grève, ce qui permet notamment de se rendre compte du travail que les femmes font, puisqu'il n'est plus possible d'en jouir si elles se sont abstenues, et c'est possiblement un moyen de pression pour établir un rapport de force.
- Le permaculteur Rob Hopkins a écrit le livre "The Transition Handbook". Il a été traduit en français sous le nom de "Manuel de Transition", par la revue Silence et les éditions écosociété en 2010. Une version résumée (faite par le "Transition Network") est disponible gratuitement (en tant que fichier informatique) : "Essential Guide to Transition" (qui a été traduit en français par "Le guide essentiel de la Transition"). En partenariat avec les éditions écosociété, Silence a publié le livre "Un écologisme apolitique ? Débat autour de la Transition" (dont les personnes autrices sont Paul Chatterton et Alice Cutler et qui date de l'année 2013). Pour aller plus loin sur cette proposition, on peut aussi par exemple se tourner vers l'asbl (association sans but lucratif) Barricade (qui est situé à Liège donc dans la Wallonie qui est une partie de la Belgique), puisque celle-ci a publié des articles sur le sujet, dont certains rédigés par Pablo Servigne.
- Un ouvrage historique de l'écologie sous l'angle de "la science dure" est "The Limits To Growth" (du Club de Rome), aussi appelé "rapport Meadows" La première version est parue en 1972. Il a été traduit en 1972 par "Halte à la croissance ?", puis en 2012 par "Les limites à la croissance (dans un monde fini)" (qui se base sur la version "30 après" de 2004).
- Les 2 co-fondateurs du concept de permaculture sont David Holmgren et Bill Mollison. Si on souhaite un résumé d'une vingtaine de pages, avec tout de même de la consistance, David Holmgren a écrit et publié informatiquement "Essence of Permaculture" (traduit de l'anglais vers le français par "L'essence de la permaculture"). Pour ce qui est du livre fondateur (qui a été écrit par les 2 co-fondateurs), il se nomme "Permaculture One" et il a été publié en 1978. Si on cherche des ouvrages plus récents, on peut se tourner respectivement vers "Permaculture: Principles and Pathways Beyond Sustainability" (traduit en français aux éditions Rue de l'échiquier par "Permaculture - Principes et pistes d'action pour un mode de vie soutenable") et "Introduction to Permaculture" (traduit en français chez Passerelle Éco en 2012 par "Introduction à la Permaculture"). Un livre plus accessible pour s'y intéresser pourrait être "Permaculture - Guérir la terre, nourrir les hommes" qui a été rédigé par Charles Hervé-Gruyer et Perrine Hervé-Gruyer, le couple qui a créé la ferme du Bec Hellouin dans la région Normandie en France, et a été édité par Actes Sud en 2014 (la première édition) et 2017 (la seconde édition). Pour un ouvrage très court, Patrick Whitefield (1949-2015) a écrit "Permaculture in a Nutshell" (publié par Permanent Publications pour la première fois en 1993), qui a été traduit en français par "Graines de Permaculture" (aux éditions Passerelle Éco).
- Parmi les auteurs phares de l'écologie politique, on peut citer par exemple : Ivan Illich (1926-2002), Serge Latouche, Murray Bookchin (1921-2006), André Gorz (1923-2007), Bernard Charbonneau (1910-1996), Élisée Reclus (1830-1905). Pour une introduction à ce sujet, on peut lire "Comprendre l'écologie politique" (publié en 2012 par l'Union des FAmilles Laïques).
- Si on souhaite une lecture "courte" à propos du concept d'idéologie, on peut se tourner vers l'article "Politique post-vérité ou journalisme post-politique ?" de Frédéric Lordon qui l'a publié le 22 novembre 2016 sur son blog "La pompe à phynance" hébergé par le journal "Le Monde diplomatique". Si on préfère quelque chose de plus touffue, il y a "La production de l'idéologie dominante" (dont l'ancrage historique a de quoi rebuter et la compréhension peut être ardu dans grosso-modo la première moitié), écrit par Pierre Bourdieu et Luc Boltanski, qui est paru pour la première fois en 1976 dans "Actes de la recherche en sciences sociales" et qui a été édité sous forme de livre en 2008 par les éditions Raisons d'agir et Demopolis. Pour une méta-idéologie écologique, il y a entre autres "la décroissance" (21).
- Pour une introduction sous forme de livre au municipalisme libertaire (aussi appelé communalisme libertaire), on peut se tourner vers "The Politics of Social Ecology: Libertarian Municupalism" (dont "Le municipalisme libertaire, la politique de l'écologie sociale" est la traduction en français chez les éditions écosociété) qui a été écrit par Janet Biehl (et publié pour la première fois en 1998).
- Murray Bookchin (1921-2006) est le théoricien principal du municipalisme libertaire.
- Le livre "Une autre fin du monde est possible" a été publié aux éditions du Seuil en 2018. Les auteurs sont Pablo Servigne, Raphaël Stevens et Gauthier Chapelle. Contrairement à d'autres ouvrages, celui-ci ne fait pas, ou plutôt peu, usage de rationnalisme (que j'affectionne), au profit du spiritualisme (qui me rend usuellement au mieux perplexe). Le journal "La Décroissance" (par "Casseurs de pub") a d'ailleurs fait une violente charge, en particulier contre les idées de ce bouquin, dans les pages 8 et 9 de son numéro 157 de mars 2019, avec notamment la sous-partie "Parlez aux arbres" qui a un titre assez clair et ce n'est malheureusement pas une exagération. On peut aussi citer un article de Daniel Tanuro : "La plongée des « collapsologues » dans la régression archaïque" publié le 6 mars 2019 dans la revue Contretemps. Il y avait déjà cela dans au moins un autre livre antérieur, en l'occurrence "Petit traité de résilience locale" (publié en 2015 aux éditions Charles Leopold Mayer par des membres de l'Institut Momentum que sont Agnès Sinaï, Raphaël Stevens, Hugo Carton, Pablo Servigne) en particulier à la fin.
- Pablo Servigne envisage la permaculture comme mode de pensée courant pour l'agriculture post-pétrole dans "Nourrir l'Europe en temps de crise - Vers des systèmes alimentaires résilients" (publié en 2017 chez Actes Sud, après une première édition en 2014 aux éditions Nature & Progrès Belgique, une version actualisée et augmentée d'un rapport public de 2013 commandé par le groupe Les Verts/ALE au parlement européen). De plus, il est positivement fait mention de Rob Hopkins et sa proposition de transition permaculturelle (7) dans "Comment tout peut s'effondrer" (16) qu'il a co-écrit.
-
Pablo Servigne se définit comme
un
chercheur in-terre-dépendant
. Il s'est fait connaitre en tant que "collapsologue", notamment à travers le livre "Comment tout peut s'effondrer - Petit manuel de collapsologie à l'usage des générations présentes", co-écrit avec Raphaël Stevens (et publié en 2015 chez les éditions du Seuil dans sa collection Anthropocène). - "L'entraide, l'autre loi de la jungle" est un livre co-écrit par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle. Il a été publié en 2017 aux éditions "Les Liens qui Libèrent". En 2019, est paru une version poche chez le même éditeur.
- Le terme "permanarchisme" est un mixte entre la permaculture et l'anarchisme. Au moment d'écrire ces lignes, c'est-à-dire en début 2019, j'ai vaguement commencé un texte à ce propos que j'ai nommé "Permanarchisme" et qui est disponible sur mon site web (www.nicola-spanti.fr), mais j'insiste sur le fait que ce n'est pour l'heure qu'une ébauche qui n'a pas encore vocation à être lue potentiellement par le plus grand nombre.
- Sur le fait que la croissance économique est mauvaise écologiquement, on peut lire un article de lundimatin (lundi.am) intitulé "Sur la bienfaisance écologique de la casse et du blocage" (publié le 14 décembre 2018), ainsi que mon commentaire "La casse matérielle, un geste pour la préservation de l'éco-sphère ?" publié sur mon site web. Si on veut se pencher sur une méta-thèse qui postule que l'économie est néfaste écologiquement, il y a notamment "la décroissance" (21).
- Sur l'incrimination du capitalisme comme destructeur écologique, on peut entre autres lire les livres : "L'anthropocène contre l'histoire" (de Andreas Malm chez La Fabrique en 2017) et "Le Capitalocène" (de Armel Campagne aux éditions Divergences en 2017). Sur la croissance économique capitaliste, j'ai écrit "L'Italie et l'énergie : un cas d'école de la pratique capitaliste "pure" de la valeur économique" (en 2018 sur mon site web). Si on veut une théorie systémique alternative, on peut par exemple se tourner vers "Le Système technicien" (1977, 2004, 2012) de Jacques Ellul (1912-1994). À titre indicatif, comme alternative aux termes "Anthropocène" et "Capitalocène", il y a entre autres "Mégalocène" et "Industrialocène".
-
La décroissance est l'idée que
la croissance de certaines choses
(dont l'économie mais pas uniquement)
est mauvaise à partir d'un certain seuil
et qu'il faut donc décroitre en-dessous des seuils.
L'aspect social y est généralement fort,
contrairement à d'autres courants écologistes.
Un slogan commun dans ce courant de pensée,
qui le résume bien très succinctement, est
moins de biens, plus de liens
. Pour une courte présentation, on peut lire "La décroissance ou le sens des limites", qui a été rédigé par Serge Latouche, et publié en 2016 par le Monde diplomatique en page 40 et 41 de son manuel d'économie critique. Si on souhaite un journal, il y a notamment "La Décroissance" (édité par "Casseurs de pub" à Lyon en France), Kairos (édité en Belgique) et "Moins!" (édité à Vevey en Suisse). La revue Silence (éditée à Lyon par une association éponyme de loi 1901) ne traite pas spécifiquement de ce sujet, mais c'est un thème courant en son sein. Pour l'historique, on peut mentionner Entropia, qui se voulait être unerevue d'étude théorique et politique de la décroissance
, mais elle a été arrêtée en 2015 après avoir démarrée en 2006. Si on cherche un livre d'introduction au sujet, on peut par exemple proposer "La décroissance, 10 questions pour comprendre et en débattre" rédigé par Denis Bayon (alias Denis Baba), Fabrice Flipo et François Schneider et publié aux éditions La Découverte en 2010. - Ivan Illich (1926-2002) est un penseur de l'écologie politique (10). Il a critiqué entre autres l'industrie, sans y être radicalement opposé, et en proposant des solutions à ce qu'il présente comme des problèmes (dont l'école fait selon lui parti). Il a inventé les concepts de monopole radical et de vitesse généralisée (qui sont tous les deux présents dans son ouvrage "Énergie et équité" paru en 1973 et un après en anglais en tant que "Energy and Equity").
- En 1973 parait le livre "Tools for Conviviality" d'Ivan Illich (22). Il a été traduit la même année en français par "La convivialité". Il y critique l'industrialisme et y propose ce qu'il entrevoit comme un remède.
- Bernard Friot est un économiste et sociologue français. Il a été notoirement inspiré par Karl Marx (1818-1883). Il a fait une thèse sur la Sécurité sociale en France, ce qui n'y est pas pour rien dans sa proposition (25).
- Pour une présentation rapide et clair du projet avec prise en compte de l'écologie, on peut lire le livre nommé "Pour une démocratie économique", écrit par Dominique Lachosme et paru en 2016 chez Atelier de Création Libertaire. Pour une introduction simple et courte de Bernard Friot lui-même (24), il y a entre autres le livre intitulé "Émanciper le travail, entretiens avec Patrick Zech" (qui est paru en 2014 aux éditions La Dispute). Pour réfléchir plus longuement et propager cette thèse, on peut se tourner vers l'association à but non lucratif créée à cet effet : Réseau Salariat. Malgré que Bernard Friot évoque relativement peu l'écologie, il s'y intéresse, comme le montre par exemple l'article "Le financement de la Sécurité sociale dépend t-il de la poursuite de la croissance économique ?" qu'il a co-réalisé avec Denis Bayon et qui a été une intervention lors du colloque "La Sécurité sociale, une institution pour l'écologie ?" (qui a été fait dans la ville de Paris en mai 2016 et qu'Atelier de Création Libertaire a édité sous la forme d'un livre éponyme).
- En France, un document de référence du syndicalisme révolutionnaire est "la charte d'Amiens" (adoptée en octobre 1906 par le 9ème congrès de la Confédération Générale du Travail). Émile Pouget (1860-1931) et Victor Griffuelhes (1874-1922) en sont les rédacteurs. Une autre figure historique de ce mouvement en France a été Fernand Pelloutier (1867-1901), qui fut un franc partisan des bourses du travail.
- Si on désire s'informer sur l'auto-gestion, on peut consulter le livre "de l'Autogestion, théories et pratiques" (publié par les éditions CNT-RP au 33 rue des Vignoles à Paris, d'abord en 2013 puis en 2017). Celui-ci est long (plus de 300 pages) et on peut le trouver fastidieux par moment. Si on veut plus court, on peut se tourner entre autres vers "L'autogestion, une idée toujours neuve" (publié par Alternative Libertaire qui est devenu l'Union Communiste Libertaire après fusion).
- Comment ont été définis "syndicalisme révolutionnaire" (= syndicalisme pour une révolution par les travailleurs et travailleurs) et "anarcho-syndicalisme" (= syndicalisme organisé selon des principes anarchistes comme l'auto-gestion et le mandant impératif) n'a aucunement pour but d'en refléter l'usage historique. C'est là des définitions conceptuelles que je propose.
- Sur la violence du rapport capitaliste, on peut envisager de lire les 2 articles suivants : "Le parti de la liquette" et "En guerre – pour la préemption salariale !", qui ont été écrits par Frédéric Lordon et publiés respectivement le 9 octobre 2015 et le 21 mai 2018, sur son blog "La pompe à phynance" hébergé par "Le Monde diplomatique". Si on est à la recherche d'une réflexion plus théorique, à plus forte raison si on souhaite s'intéresser à la philosophie de Baruch Spinoza (1632-1677), on peut proposer le livre "Capitalisme, désir et servitude - Marx et Spinoza" (écrit par Frédéric Lordon et publié en 2010 aux éditions La Fabrique).
- Si on cherchait un livre dense et théorique sur le fait institutionnel, on pourrait se tourner entre autres vers "La Société des affects - Pour un structuralisme des passions" (écrit par Frédéric Lordon et publié en 2015 aux éditions Points, mais originellement paru en 2013 aux éditions Seuil). En s'appuyant avant tout sur Baruch Spinoza (1632-1677), mais aussi sur d'autres personnes comme Karl Marx (1818-1883), Frédéric Lordon propose une vision holistique du social.
- Dans "Thèses sur [Ludwig] Feuerbach", c'est la onzième et dernière, donc la conlusion. C'est Karl Marx (1818-1883) qui a écrit ceci en 1845.
Post-scriptum : le 8 mars féministe, un prétexte
Oh oui, le début du texte est à propos du féminisme. Mais après, il faut bien avouer que c'est l'absence quasi-générale. Ce n'est pas un hasard ou une erreur lors de l'écriture. Je suis un homme blanc cisgenre hétérosexuelle aisé dans un pays baignant (pour le moment) dans un luxe insensé (en l'occurrence la France, qui est mon pays natal). Il n'y a donc nullement lieu de s'étonner que racisme, xénophobie, sexisme, lgbtophobie et compagine ne fassent pas parti des thèmes centraux de ma pensée : je ne subis pas ces violences systématiques, donc mon intérêt à leur égard est moindre que pour les victimes. Ce n'est pas parce que je les évoque peu et que je me renseigne peu sur elles comparées à d'autres sujets, que je ne m'y intéresse pas du tout, au contraire je m'y intéresse en tachant de garder à l'esprit ma relative ignorance.
Parmi les sujets qui me taraudent en ce moment (c'est-à-dire en début 2019), il y a notamment le capitalisme et la destruction écologique. Pour le premier, le capitalisme, j'en constate des effets sociaux sur les autres et d'une manière très gentillette sur moi (étant un ingénieur informaticien payé au-dessus du salaire médian et avec un marché du travail capitaliste temporairement avantageux à ma profession). Pour le second, la destruction écologique, je n'en subis pour le moment nullement les conséquences, mais il est fort vraisemblable que cela ne durera pas (8, 16). Il se trouve que la critique des deux va bien ensemble et que les solutions potentielles des deux peuvent être tout à fait compatibles.
Et voilà ce texte, avec un départ sur le féminisme via le 8 mars qui est ensuite exploité pour dériver plus généralement sur la grève (ce qui était pensé dès le début, aussi bien dans le fond que dans le titre), puis étendre la réflexion encore plus globalement socialement. Je suis donc bien conscient que ce texte n'est pas avant tout féministe, il est avant tout écologiste et social. Il a néanmoins l'avantage de m'exprimer explicitement sur le sexisme, ce qui a été pour le moment chose rare par écrit. La grève du 8 mars m'a insufflé l'écriture de ce texte, dont j'avais déjà avant les idées, mais que je n'avais pas encore pris le temps de synthétiser dans un article court, dont l'orgie de notes est symptomatique d'une synthétisation peu aisée si on ne connait pas préalablement ce que je propose de relier dans un tout que j'entrevois comme cohérent et utiles aux 2 méta-groupes auxquels je m'adresse dans ce texte (à savoir les écologistes et les militant·e·s sociaux). Toutefois les notes ont aussi pour rôle de donner des références si on veut s'intéresser à un sujet évoqué.
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